La société par actions (compagnie) est un véhicule fréquemment employé pour exploiter une entreprise. Parmi les avantages de la société par actions qui exploite une entreprise se trouve la possibilité de déduire les dépenses encourues pour gagner un revenu et un taux d'imposition moindre que celui des particuliers. Les occasions sont nombreuses pour les actionnaires de chercher à s'avantager personnellement. Le fisc est au courant et la loi peut-être très pénalisante dans certains cas.
Principe d'intégration
Un particulier peut exploiter une entreprise et être imposé sur son revenu d'entreprise dans sa déclaration de revenu au plan personnel. Si l'on pose que le particulier gagne un revenu d'entreprise suffisamment élevé, le taux d'impôt marginal maximal (fédéral et provincial) le plus élevé qu'il devra acquitter est de 48,2 % sur la tranche la plus élevée de ses revenus.
Le même particulier peut exploiter la même entreprise par le biais d'une société par actions. Celle-ci, si elle est une petite entreprise au sens de la Loi de l'impôt sur le revenu1(ci-après « L.I.R ».), payera un impôt d'environ 20 % (fédéral et provincial) sur le même revenu d'entreprise. Il y a donc une économie d'impôt substantielle2.
Cependant, l'objectif des actionnaires d'une société par actions est d'obtenir un rendement sur le capital investi. Si la société génère des profits et que les actionnaires veulent en toucher une partie, ils se versent alors des dividendes sur lesquels ils seront imposés. L'impôt sur le dividende aux actionnaires s'ajoute à l'impôt payé par la société par actions. Le total est sensiblement égal au taux global 48,2 % qui aurait été payé par un particulier. Donc, que le revenu soit gagné par un particulier ou par une société par actions, en fin de compte le prélèvement est à peu près le même. C'est le principe d'intégration.
Avantage à un actionnaire
Comme la société par actions est imposée à un taux moindre et qu'elle déduit toutes ses dépenses de façon générale, il peut être tentant pour un actionnaire de s'avantager aux frais de la société. Par exemple, en bénéficiant de biens (automobile, avion, bateau, outils, logement, etc.) appartenant à la société, mais dont l'actionnaire ferait un usage personnel. Au lieu d'obtenir ces biens personnellement avec de l'argent après impôt, l'actionnaire tente d'obtenir le même avantage avec de l'argent net d'impôt.
Une autre forme d'avantage consiste à tenter de sortir les profits accumulés d'une société par actions sans passer par un paiement imposable (dividende, salaire, boni). L'achat d'un bien de la société a un prix inférieur à la juste valeur marchande du bien est un exemple. Le paiement d'autres dépenses personnelles en est un autre. L'imagination humaine étant ce qu'elle est, les stratagèmes employés pour tenter de s'avantager sont innombrables.
Le principe établi par la L.I.R. est bien simple : la valeur de l'avantage conféré à l'actionnaire est ajoutée à son revenu3. Les vérificateurs sont à l'affût des transactions entre une société par actions et ses actionnaires et plusieurs de ces transactions donnent lieu à des cotisations. La société par actions se voit généralement privée de la déduction et l'actionnaire se voit imposé avec intérêts et pénalités dans certains cas.
Prêt à un actionnaire
Lorsqu'une société par actions dispose de liquidités excédentaires, il est tentant pour un actionnaire d'emprunter l'argent de la société. Ce serait une façon d'utiliser les profits accumulés d'une société par actions sans passer par le versement d'un dividende imposable pour l'actionnaire. Trop facile. La loi prévoit donc que le montant du prêt doit être inclus dans le revenu4 de l'actionnaire. Il serait trop facile également de prêter l'argent à une personne liée comme un conjoint,
La loi comprend cependant des exceptions notamment le prêt d'une société par actions offert à tous ses employés pour différentes fins comme l'acquisition d'une habitation, l'acquisition d'une automobile pour le travail, l'acquisition d'actions de l'entreprise. Ces exceptions ne sont pas facilement disponibles cependant pour les actionnaires qui détiennent plus de 10 % des actions de la société. Il est important que la faculté d'emprunter soit donnée à tous les employés qui sont actionnaires (à moins de 10 % ), autrement il sera présumé que le prêt est consenti à la personne en raison de sa qualité d'actionnaire et le prêt devra être inclus en entier dans son revenu. Cette présomption découle du texte de la loi qui dit que l'on doit pouvoir conclure que le prêt a été consenti en raison de la qualité d'employé et non en raison du nombre d'actions que la personne détient.
Une autre exception très importante est prévue lorsque l'actionnaire qui a bénéficié du prêt a remboursé ledit prêt dans l'année qui suit celle où le prêt a été consenti. L'année de référence est celle de la société prêteuse de sorte que l'actionnaire dispose pratiquement de deux ans pour rembourser si l'emprunt est consenti au début de l'année d'imposition de la société. En pratique, on voit souvent le compte « avances à l'actionnaire » être réduit à zéro par le paiement de dividendes ou de bonis. Cela ne constitue pas un remboursement de prêt puisque les dividendes et bonis sont imposables. Si les opérations de prêts et remboursements font partie d'une série, l'exception ne sera pas valable non plus.
Dans tous les cas de prêts, un intérêt minimal à un taux prescrit par la loi doit s'appliquer à moins que le montant total du prêt ait été inclus dans le revenu.
Si le prêt a été inclus dans le revenu de l'actionnaire et qu'il rembourse le prêt, le remboursement sera déductible dans l'année du remboursement.
1 - Art. 125, Loi de l'impôt sur le revenu, L.R.C. 1985 (5e supp.), c. 1.
2 - De façon générale, on peut dire que l'objectif de taxer les sociétés par actions à un taux moindre est de favoriser le réinvestissement de ses profits. Les petites entreprises ont de grands besoins de financement et une fiscalité moins lourde les aide. Par ailleurs, si la société par actions dispose de liquidités qui excèdent ses besoins, elle sera plus lourdement taxée sur le revenu généré par les liquidités excédentaires. Dans le même cas de figure, ses actions pourraient ne plus être des actions admissibles aux fins de l'exonération du gain en capital de 750 000 $.
3 - Par.15(1), L.I.R.; Art. 111, 112, Loi sur les impôts, L.R.Q. c. I-3. (ci-après « L.I.»).
4 - Par. 15(2), L.I.R.; Art. 113 L.I. |