Il est possible en droit civil et en droit des sociétés de remédier à certaines erreurs et d'obtenir des rectifications pouvant avoir des conséquences en matière fiscale.
Felix & Norton International et Canada (Procureur général), 2009 QCCS 919
Dividende en capital
Le gain en capital est devenu partiellement imposable au Canada en 1972. Depuis, le pourcentage imposable d'un gain en capital a varié et il s'établit actuellement à 50 % . Donc, la moitié d'un gain est imposable, l'autre moitié est libre d'impôt. Cette règle vaut autant pour les sociétés par actions que pour les individus. Il ne s'agit pas de la seule catégorie de revenu qui ne soit pas imposable, il en existe d'autres comme le produit de certaines polices d'assurance-vie.
Lorsqu'une société par actions réalise un gain en capital ou un autre revenu non imposable, la partie du revenu qui est non imposable vient accroître un « compte de dividendes en capital », à même lequel la société peut verser un dividende non imposable à ses actionnaires.
Pour éviter que les sociétés déclarent des dividendes non imposables supérieurs à ce que la loi permet, un impôt punitif de 75 % s'applique à tout dividende non imposable supérieur au solde du « compte de dividendes en capital ».
Calcul du « compte de dividendes en capital »
Le « compte de dividendes en capital » est un compte cumulatif qui bien sûr prévoit des additions et des soustractions au fil des évènements et des années. Comme dans toutes autres situations, le fisc peut ne pas être d'accord avec les calculs que ferait un contribuable et il en résulte une incertitude. Il n'est pas possible de demander au fisc le calcul du « compte de dividendes en capital » d'une société. Seule l'Agence du revenu du Canada tient une comptabilité de ce compte et cette comptabilité s'effectue après-coup.
Les sociétés doivent donc être prudentes avant de déclarer un dividende en capital et elles se fient généralement à leurs experts, principalement leur comptable, avant de déclarer un tel dividende. On peut aussi dire que la considération la plus importante de la société avant de déclarer un dividende en capital est que ce dividende sera non-imposable. On ne déclarera pas de dividende excédentaire sciemment sachant que l'on s'expose alors à des impôts punitifs de 75 % du dépassement.
Le cas Felix & Norton
Se fiant à ses nouveaux comptables, la société a déclaré un dividende en capital de 950 000 $ alors que le « compte de dividendes en capital » ne permettait qu'un dividende de 750 000 $. Un dividende excédentaire de 200 000 $ résultait alors en un impôt de 150 000 $.
La société a choisi de demander au tribunal l'annulation de la résolution déclarant le dividende de 950 000 $. L'annulation prononcée par le tribunal aurait pour effet de rendre nulle la résolution, elle serait réputée n'avoir jamais existée.
Mise en cause des autorités fiscales
Dans cette affaire, la société a, dans la procédure en Cour supérieure visant à faire annuler la résolution, mis en cause les autorités fiscales fédérales et celles du Québec. Le Procureur général du Canada ne contestait pas la demande ce qui n'était pas le cas du sous-ministre du Revenu du Québec.
Le tribunal a mis de côté l'argument du Québec voulant que le seul remède possible soit celui contenu au paragraphe 184(3) de la Loi de l'impôt sur le revenu, L.R.C. 1985 (5e supp.). Le juge Sénécal a relevé que les tribunaux s'étaient maintes fois prononcés sur leur capacité à annuler des actes juridiques ou à rectifier des erreurs lorsque les faits le justifiaient.
Erreur excusable de bonne foi
Le tribunal a déterminé que l'erreur n'était pas une erreur inexcusable étant donné les circonstances et que les renseignements erronés fournis par le comptable avaient vicié la décision de déclarer le dividende et, en conséquence, la résolution a été annulée. La décision est opposable au fisc puisque la résolution est censée n'avoir jamais été adoptée. En vertu du principe que le fiscal suit le civil, la société n'aura plus d'impôt à verser sur un dividende inexistant. |